En Mars 2017 je suis contacté par Antoine Magyar du site Cocy.fr et je répond à quelques unes de ces questions.

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C’est dans son atelier du 18ème arrondissement de Paris qu’on a fait la rencontre de l’artiste peintre contemporain Jérémie Baldocchi. On a ainsi pu découvrir un homme sensible qui aime dessiner des corps aux courbes asymétriques et sans visage, qui seront visibles le week-end du 10 juin pour l’ouverture au public de son atelier. Rencontre.

Comment as tu commencé à peindre?
D’aussi loin que je me souvienne j’ai toujours voulu faire un métier artistique. Ma grand-mère peignait, mon grand-père aussi et sculptait tandis que mon oncle était styliste. Je baignais déjà un peu dans cet univers. Puis j’ai suivi mon cursus scolaire classique mais c’était une horreur pour moi donc lorsque je suis arrivé en seconde j’ai arrêté les cours suite au congés-maladie d’une prof que j’appréciais beaucoup et qui était la seule raison pour laquelle je n’avais pas encore quitté l’école. J’ai continué mon petit boulot d’à point et parallèlement à ça je me suis mis à prendre des cours du soir d’illustration et d’architecture d’intérieur. L’année suivante j’ai récupéré le cursus de jour. On nous formait beaucoup à être illustrateur, donc lorsque j’ai fini mes trois années d’études  j’ai contacté de nombreux magazines pour lesquels j’ai travaillé par la suite. Puis un jour j’ai eu l’occasion d’exposer mes dessins à la Fnac et depuis ce jour, tout a pris une autre dimension. Je ne faisais plus partie du journal, mes dessins existaient par eux-mêmes. Des galeries m’ont contacté et petit à petit j’ai changé de support, je suis allé du papier vers la toile, du crayon au pinceau.

Tu te souviens de ton ressenti lors de ta première exposition?
Je me souviens de la veille de cette première exposition ! Je séjournais chez mon ami de l’époque et j’étais tellement stressé que je n’arrivais pas à dormir. J’étais paniqué à l’idée de montrer mes oeuvres sans têtes à un nouveau public. Dis-toi que j’avais même préparé toutes mes têtes de côté au cas où il me prenait l’envie de les coller par dessus au dernier moment. Mais mon ami m’a rassuré en me disant que si j’étais sûr de mon travail je devais aller au bout de ma démarche artistique au moins une fois.

D’où vient le fait qu’il n’y ait jamais de tête sur les personnages de tes oeuvres?
Ça a commencé lors d’un des cours du soir dont je te parlais juste avant. On avait un travail à rendre sur le thème de « l’accident ». Donc je suis parti sur l’idée d’un couple dont la nana était tombée enceinte sans le vouloir. Le seul problème c’est que je n’arrivais pas à choisir quelle émotion mettre sur leur visage. Donc j’ai fait mon illustration sans les têtes et je suis allé à mon cours pour avoir les conseils de mon prof de l’époque. Mais il m’a tout simplement répondu que je n’avais pas besoin de rajouter des visages ou des têtes car le fait que chacun puisse s’imaginer leur expression était bien mieux ! J’ai réalisé que j’aimais bien l’idée donc je n’ai plus mis de tête à mes personnages !

Toutes tes oeuvres sont très colorées, très brillantes et joviales. Elles respirent la bonne humeur !
Merci ! L’art est fait pour plein de raisons mais pour moi c’est avant tout pour faire ressentir des émotions à celui qui le regarde. Il y a des oeuvres tristes qui sont magnifiques, notamment chez les peintres flamands mais je serais incapable de faire pareil ! Dans mes oeuvres il s’agit plus d’une hymne à la vie et à la joie. J’aime beaucoup les paillettes également, j’ai été très influencé par le travail de Pierre et Gilles là-dessus. Après, j’ai tout de même quelques oeuvres plus sombres, plus mélancoliques.

Oui j’imagine. Tes oeuvres sont-elles toujours influencées par ta vie quotidienne?  
Oui, obligatoirement. L’artistique est très personnel, donc il évolue en même temps que nous. On met quelque chose de nous dans chaque tableau. Tout est dicté par nos pensées, notre vie, notre humeur. A une époque où je venais de me séparer j’ai eu une grosse période de dépression ce qui a entrainé des tableaux beaucoup plus sombres. J’ai également un très mauvais relationnel avec mon corps, ça peut se ressentir et se voir dans mes oeuvres. Tous les corps que je dessine ne sont jamais parfaits, ils sont toujours difformes.

D’où vient cette relation particulière avec ton corps?
J’étais un adolescent très gros, j’ai fait jusqu’à 110 kg. Et vers mes dix-sept ans j’ai du avoir une opération de la bouche qui m’a obligé à ne plus pouvoir l’ouvrir pendant deux mois, donc je n’ai pu manger qu’à la paille. Malgré les médicaments pour éviter les carences, j’ai perdu 40 kg. En juin je faisais 110 kg et en septembre 70 kg  ! Ça m’a donné une claque parce que je ne me reconnaissais plus. Ça a été tellement soudain que même mes relations avec les autres ont changé, mon image n’était plus du tout la même. Ça a modifié totalement la relation avec mon corps et encore aujourd’hui j’ai toujours l’impression d’être un gros dans un corps de mince. Depuis, je suis attiré par les corps différents, un peu amochés ou avec des particularités. Pour moi il n’y a pas que le visage qui peu montrer une émotion, le corps aussi. C’est d’ailleurs ce que j’essaye de faire avec mes personnages.

Quel est ton processus de création?
Généralement j’essaye d’abord de trouver un sujet puis la manière dont je veux le traiter. Je me laisse transporter par mes influences, ce que je vois autour de moi, puis l’idée prend forme dans ma tête. Je dessine énormément de croquis de personnages, j’en ai des milliers. Donc lorsque je sais vers quoi je veux tendre, je me mets à fouiller dans mes croquis à la recherche du personnage parfait. C’est comme une sorte de casting. J’étudie les meilleurs pour en choisir un qui fera office de base. Puis je redessine les courbures, j’habille mon personnage et le met en situation. Ensuite je passe à la couleur ce qui est le moins évident.

Un peintre doit-il constamment se réinventer pour toi?  
Je pense qu’il faut avant tout pouvoir se renouveler soi-même pour pouvoir continuer. L’art peut se démoder ! Rien n’est jamais acquis, il faut toujours faire ses preuves dans ce milieu. Nous sommes des créatifs, alors notre rôle est de créer. Il faut se renouveler tout en gardant son identité, chercher à aller plus loin, repousser ses propres limites. Il y a quelques temps je n’arrivais pas à mettre mes personnages dans un cadre extérieur. Il fallait toujours que je les place à l’intérieur, enfermé. Mais je me suis forcé à les faire sortir, car beaucoup de sujets se prêtent à l’extérieur !

Notamment l’un de tes derniers comme la fée des glaces sur son orque.
Oui c’était d’ailleurs ma carte de voeux 2017. J’ai pas mal réfléchi au discours que je voulais tenir. Je voulais une reine qui passent au dessus de nos maisons et qui s’envolent. C’est l’une de mes dernières toiles et cela m’a donné envie de la décliner selon les saisons. La prochaine sera sûrement la Reine du Pollen, donc associée au printemps et chevauchera un crocodile. J’ai déjà pas mal d’idées et j’ai déjà passé mon casting donc j’en suis à ma dernière étape : la couleur.

Où pourra-t-on découvrir ton travail prochainement?
J’ouvre mon atelier en juin prochain pendant un week-end pour pouvoir présenter mes nouvelles oeuvres et pouvoir dialoguer avec mon public. Les rencontres sont toujours très riches donc je fais ça chaque année.

Que peux-ton te souhaiter pour 2017?
De garder l’esprit vif ! De continuer à avoir des idées et que la flamme créative ne s’éteigne jamais.

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